Ne parlons pas des incidents qui eurent lieu ce mercredi soir, le 29 juin 2016, à l’Athénée municipal de Bordeaux lors du meeting du PS : la presse en a relayé les principaux faits (articles Sud-Ouest et Rue89bordeaux), ainsi que notre page facebook. Et les adhérents de Nouvelle Donne sont motivés par les idées plus que par la politique spectacle.
Nous nous proposons de reprendre quelques-unes des idées exprimées par les socialistes qui se sont succédé sur scène : Michèle Delaunay (députée de Bordeaux), Alain Rousset (Président de la Région) et Stéphane Le Foll (ministre de l’agriculture, porte-parole du gouvernement), et d’ouvrir le débat qui n’a pas eu lieu ce soir-là. Ces commentaires permettront d’approcher les différences profondes entre nos propositions et la politique actuellement mise en oeuvre.
NB : les citations des élus sont faites de mémoire, mais le sens est conservé.
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Michèle Delaunay a défendu son action lors de son passage au gouvernement : « J’ai fait augmenter l’APA (Aide Personnalisée d’Autonomie) et rien que cela me suffit à être fière d’agir en politique. »
Nouvelle Donne Gironde : C’est vrai. Cette APA a effectivement été augmentée sensiblement (plus d’infos ici). On ne peut que s’en réjouir. La redistribution des richesses est indispensable dans un pays où la pauvreté s’accroît . Mais le financement de la mesure risque à terme de poser problème : il repose en partie sur la Contribution Autonomie Solidarité (la journée supplémentaire travaillée gratuitement) et sur l’imposition des retraités qui gagnent suffisamment. Or il est plus que probable que le pourcentage de la population active va diminuer dans les prochaines années ; cette diminution, si la politique des dernières décennies continue, aura aussi des conséquences sur les pensions des retraités (le nombre de chômeurs après 50 ans étant de plus en plus important).
Bref on regrettera que l’aide (bienvenue) à l’autonomie des plus âgés ne s’inscrive pas dans une vision globale de la répartition des richesses et du travail. Il faudra bien prendre à bras-le-corps la proposition d’une autre répartition du temps de travail que fait Nouvelle Donne, afin que cesse la mise à l’écart d’une partie croissante d’entre nous, et que chacun contribue, comme citoyen solidaire, au bien-être de tous.
Pour infos, sur le financement de l’APA : ici et ici (un peu ancien).
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Alain Rousset : « Je suis pour l’article 2 de la loi Travail : cela permettra aux syndicats trop faibles en France de reprendre du poids. »
ND Gironde : Alain Rousset défend l’inversion des normes en matière de droit du travail (la loi devient secondaire face aux décisions votées en entreprise) au nom du renforcement des syndicats, notoirement en sous-effectifs en France. Nouvelle Donne dès le départ s’est opposé à cette inversion des normes : ce n’est pas en fragilisant la parole nationale qu’on renforce la parole des travailleurs. On rappellera ce qu’écrivent Dominique Méda et Pierre Larrouturou : « Quand on a plus de 6 millions de chômeurs inscrits à pôle Emploi, la concertation à l’intérieur des entreprises se résume souvent à « Si tu n’es pas content, tu peux aller voir ailleurs.». »
Par ailleurs, le choix social-libéral du PS ne créera pas d’emplois : le chômage structurel que nous subissons de plus en plus depuis 40 ans est grandement lié aux progrès de la productivité. À nouveau, on soulignera que le moyen le plus sûr pour « purger » la différence entre marché du travail et productivité, c’est de répartir le temps de travail de manière à ce qu’on travaille moins individuellement, mais qu’on soit plus nombreux à travailler collectivement.
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Alain Rousset : « Il n’y a pas assez de décentralisation dans notre pays trop jacobin, il faut donner plus de pouvoirs aux collectivités locales. »
ND Gironde : Nous pourrions applaudir des deux mains cette envie de répartir le pouvoir vers les collectivités territoriales si cela s’accompagnait d’une mesure qui nous semble centrale à Nouvelle Donne : la fin du cumul des mandats non seulement en même temps, mais aussi dans le temps (pas plus de deux mandats). La vie politique doit devenir un service civique accessible à tous les citoyens, et non un projet de carrière. Cet aspect est absolument essentiel si nous ne voulons pas que la décentralisation permette à des baronnies locales de se développer, avec les risques afférents de copinages, d’accointances, d’habitudes courtisanes… Les adhérents de Nouvelle Donne dénoncent tous les cumuls dans le temps qui existent ou ont existé en Gironde (à la Région, au département, à la mairie de Bordeaux). Le non-cumul fait partie des engagements des candidats de Nouvelle Donne (cf. charte). Il nous semble qu’il doit être généralisé à tous.
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Stéphane Le Foll : « Ceux qui s’opposent à nous sont les mêmes que ceux qui s’opposaient à Léon Blum. »
ND Gironde : Jaurès et Blum sont des noms régulièrement lancés en pâture dans le cadre d’une rhétorique bien rodée. Créer une opposition simpliste entre les « gentils » et les « méchants » permet de gagner sur le moment par l’effet de stupeur qu’elle pourrait produire chez les auditeurs accusés, et d’excitation chez les partisans de l’orateur. Ensuite, cette stupéfaction, créant de l’énervement permet d’anesthésier la réflexion de fond. C’est vieux comme la démocratie athénienne !
Cependant, Nouvelle Donne travaille sous l’égide d’une charte éthique (ici) qui va à l’encontre de ces facilités oratoires : qualité de l’action politique, la politique comme art du bien-vivre ensemble, respect de la contradiction, refus de l’outrance…
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Stéphane Le Foll : « Cela va mieux, et la pauvreté recule en France. »
ND Gironde : Nous rêvons tous du moment où un gouvernement pourra l’annoncer vraiment. Ce n’est pas ce que dit l’Observatoire des inégalités (ici). Si le taux de pauvreté stagne depuis 2012, « C’est dû, de façon paradoxale, à une extension de la crise aux couches moyennes. Le seuil de pauvreté, calculé en fonction du niveau de vie médian a même diminué en 2012 : des personnes pauvres en 2011 ne l’étaient plus en 2012 avec le même revenu. La situation des catégories les moins favorisées est très loin de s’améliorer ou de se stabiliser : ainsi, entre 2012 et 2014, le nombre de titulaires du RSA a augmenté de 200 000, soit +12,9 %. »
À nouveau, il faut convaincre nos concitoyens que le chômage n’est pas lié à un manque de croissance (celle-ci ne sera plus jamais assez forte pour créer de emplois sur le long terme), mais à une transformation fondamentale séculaire de nos économies : nous produisons de plus en plus avec de moins en moins de gens. Où vont les richesses créées, alors ? Mais vers le monde de la finance et de l’actionnariat ! Depuis les dérégulations imposées par Reagan et Thatcher, suivies sagement par tous les gouvernements en France, c’est l’équivalent de 150 % du PIB qui ont été détournés au profit des actionnaires.
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Stéphane Le Foll : « La fraude fiscale, parlons-en justement ! Nous sommes le premier gouvernement à réussir une vraie lutte contre l’évasion fiscale et à faire pression pour qu’une telle politique soit réalisée à l’échelle européenne. »
ND Gironde : C’est vrai, la lutte contre la fraude fiscale a été plus efficace (ici). Mais il faut continuer et être beaucoup plus sévère : Nouvelle Donne proposait dès les élections européennes de 2014 de relancer la construction européenne à partir d’un groupe restreint. Parmi les conditions pour en être, il y avait la non-appartenance aux paradis fiscaux. Mais nous proposions aussi de refuser l’accès aux marchés publics pour les entreprises qui ont un pied dans ces paradis fiscaux, de lever le secret bancaire en ajoutant un FATCA (comme les États-Unis l’ont fait avec la Suisse), réglementer les prix de transfert (cf. document).
Ne nous y trompons pas : le gouvernement, soutenu par les élus girondins, s’est enferré dans une politique de l’offre((Stéphane Le Foll, Les Échos, 17 janvier 2014 : « La politique de l’offre n’est ni de droite, ni de gauche : elle est nécessaire. »)) qui ne peut qu’accélérer les causes réelles du chômage. En refusant une vraie redistribution des richesses vers les citoyens, le PS oublie et trahit ses électeurs. En appliquant une politique de droite molle, il pense éviter l’arrivée au pouvoir de la droite dure. En se contentant de gérer une société fondée sur les valeurs de l’économisme et non plus de l’humanisme, il oublie de penser un autre monde possible. Mais en faisant des mensonges et des renoncements une habitude, il pousse tout doucement les plus désespérés d’entre nous vers les extrêmes qui cultivent la démagogie et la haine. À cela, Nouvelle Donne répond par un discours d’espoirs fondés sur des analyses objectives, sur des expériences faites notamment à l’étranger et sur l’énergie de l’intelligence collective. Au chaos, Nouvelle Donne préfère le sursaut…
Cyril Mouquet (adhérent Nouvelle Donne Gironde)
J’approuve, en tous points, les analyses et prises de position de Nouvelle donne. Mais, encore faut-il que les citoyens en aient connaissance. N’est-il pas possible de lancer une grande campagne pour mettre un terme à la monopolisation des émissions politiques télévisuelles par les mêmes partis avec la complicité des journalistes qui s’emploient, en permanence,à « anesthésier » intellectuellement l’opinion publique?
Une intervention en ce sens auprès du C S A , voire du Président de la République, n’est-elle pas envisageable?
Bonjour et merci. En effet, l’accès aux médias reste difficile pour les mouvements citoyens et les partis innovants. Nous en faisons l’expérience à chaque candidature depuis 2014. Il n’est pas sûr qu’une intervention auprès de F. Hollande soit efficace : le gouvernement a changé il y a quelques semaines la loi électorale pour aller dans le sens contraire de ce que nous attentons (voir la réaction de ND : https://www.nouvelledonne.fr/loi-relative-a-la-modification-des-regles-de-lelection-presidentielle/). Des lettres d’alerte ont déjà été envoyées au CSA lors des campagnes précédentes : elles ne font guère d’effet. La réponse de notre journal régional a été de dire qu’il n’y avait pas de demande des lecteurs pour cela… Argument du serpent qui se mord la queue. Il faudrait que tous les gens intéressés, comme vous, le fassent savoir à leurs médias locaux. En attendant, nous essayons de promouvoir les communications via les réseaux sociaux et en organisant des actions locales. Mais nous avons besoin de monde (si cela vous tente !).
Nous devons aussi, pour l’instant, compter sur la présence médiatique de notre co-président Pierre Larrouturou ou de notre co-présidente Nathalie Cayet (https://www.youtube.com/watch?v=zQmD8AfOAPw).